Intervention sur le voeu du conseil municipal de Villeurbanne du 2 février 2009

Monsieur le maire, chers collègues,

Le groupe des élus communistes et républicains présente ce soir au vote de notre assemblée un vœu sur la privatisation de La Poste.

Ce vœu comporte deux volets, un national et un local.

Le volet national concerne un débat sur la réforme des statuts de La Poste dans l’application d’une directive européenne sur la libéralisation du marché postal au 1er janvier 2011. C’est un sujet national et européen très loin des attributions de notre conseil municipal.

Mais je sais bien que certains de nos collègues se rêvent en parlementaires…
Soit !

Quelle est la situation réelle loin des discours démagogiques et anti-européens ?

En octobre 2006, la commission européenne a présenté une directive pour libérer et mettre en concurrence le marché postal au 1er janvier 2009 notamment pour les distributions des lettres de moins de 50 grammes.
Au RU, en Suède, aux Pays Bas et en Allemagne ce marché est déjà libéré parfois sous la direction de gouvernements socialistes !

Le Parlement européen après de longs débats a adopté le 31 janvier 2008 la directive avec un report au 1er janvier 2011 et l’introduction de clauses visant à rejeter tout dumping social et dégradation des conditions de travail.

En France, le gouvernement de François Fillon a lancé des consultations auprès de tous les acteurs concernés par la libéralisation du marché postal et du changement de statut de La Poste :
-La Poste a signé avec l’Etat, le 22 juillet, un contrat redéfinissant ses engagements portant notamment sur quatre missions : le service postal universel, l’acheminement de la presse, l’accessibilité bancaire, et l’aménagement du territoire.

Le service postal universel
La première obligation impose notamment la levée et la distribution du courrier six jours sur sept au même tarif partout en France. Le Service universel postal permet aussi à chaque particulier d’accéder facilement aux services courrier-colis sur l’ensemble du territoire.
Par ailleurs, le contrat fixe des critères de qualité de service : La Poste s’engage pour 2009 à acheminer 84 % du courrier le lendemain de son envoi, la proportion devant atteindre 85 % en 2010. Autre exemple : le délai d’attente moyen dans les bureaux devrait passer de 10 minutes en 2008 à 8 minutes dans deux ans et être ramené à 5 minutes pour les opérations simples dans les mille plus grands bureaux du territoire. Dans le contrat, l’Etat s’engage à "mettre en place un dispositif permettant d’assurer un financement du service universel, pérenne, économiquement efficace".
L’acheminement de la presse
Les quotidiens et périodiques doivent être distribués "six jours par semaine, sur tout le territoire (...) à un prix abordable". L’Etat s’engage à apporter une contribution financière adaptée au transport de la presse. La Poste s’engage de son côté à améliorer son efficacité et à développer son offre de services à la presse. Enfin, le contrat fixe un cadre de travail pour le nouvel accord tripartite Etat/presse/Poste et précise que le dispositif qui en résultera devra couvrir les coûts de La Poste.
L’accessibilité bancaire
Chaque client de La Poste doit désormais avoir la possibilité d’ouvrir un compte quel que soit son niveau de ressources. Cette obligation vient renforcer le dispositif actuel, prévoyant que l’établissement doit ouvrir un Livret A à partir d’un simple dépôt de 1,50 euros.
L’aménagement du territoire
En matière de déploiement de la présence postale sur le territoire, "pas plus de 10 % de la population d’un département ne doit se trouver éloignée de plus de 5 kilomètres et de plus de 20 minutes de trajet automobile (...) des plus proches points de contact de La Poste", détaille le contrat, ce qui devrait assurer le maintien des 17 000 points de contact existant actuellement en France.
La mission d’aménagement du territoire est financée par un allégement fiscal affecté à un fonds postal de péréquation territoriale. L’Etat s’engage à garantir la stabilité de financement de ce fonds national et à soutenir le dialogue territorial et l’adaptation du réseau.

L’Etat réaffirme dans ce cadre son souhait que le service universel continue d’être exercé dans l’intérêt de la collectivité nationale tout en permettant à La Poste d’affronter la concurrence et de se maintenir parmi les premiers opérateurs européens.

-Pour préparer ce projet, Christine Lagarde et Luc Chatel ont décidé la création d’une commission pour le développement de La Poste recueillant les positions de l’ensemble des parties, en particulier les partenaires sociaux et les élus locaux. Installée le 26 septembre, elle est chargée d’étudier les différentes voies de développement de l’établissement et de proposer les modes de financement de son évolution.

-Cette commission a remis son rapport au premier ministre en décembre 2008. François Fillon a rappelé le souhait du Gouvernement de donner à La Poste tous les moyens et outils nécessaires à son développement, avec la triple exigence de veiller au maintien du caractère public de La Poste, de préserver les droits et statuts des personnels de l’entreprise, et de développer les missions de service public de La Poste (service universel postal, aménagement du territoire, accessibilité bancaire...).

Quels sont les principaux points du rapport ?
La commission Ailleret prône un changement de la Poste en société anonyme afin que l'entreprise puisse lever les capitaux et faire face à la concurrence.
Avec l'ouverture du marché à la concurrence, en 2011, il est crucial que La Poste s'adapte au marché. Les dirigeants de La Poste avaient chiffré leurs besoins financiers: il leur fallait 3 milliards d'euros environ. Soit deux milliards pour le désendettement et 1 milliard pour l'investissement. L'entreprise publique demandait à l'Etat le droit d'adopter le statut de société anonyme (SA).
La commission estime que la Poste «ne dispose pas d'une marge de manœuvre suffisante pour mener à bien son projet industriel, (…) l'apport de ressources financières est indispensable pour réaliser l'ambition».
Selon le rapport, deux solutions sont proposées.
L'une consisterait à faire entrer des actionnaires (la Caisse des dépôts et consignations, ou des compagnies d'assurances) dans son capital. Cette option conduirait à un changement de statut de l'entreprise et à la mise en place d'une nouvelle gouvernance. Le passage du statut d'Epic (établissement public à caractère industriel et commercial) à celui de SA permettrait au groupe d'augmenter son capital selon ses besoins. La commission ouvre ainsi la voie à une réforme qu'elle juge indispensable.
L'autre solution n'aurait aucune incidence sur son statut. Il s'agit de l'apport de capitaux de l'Etat, qui lui permettrait de renforcer ses fonds propres. Cependant, ceci aurait un coût pour l'Etat, alors que le montant des déficits publics est déjà colossal.
Le débat public va maintenant s’engager autour des propositions que va faire le gouvernement, les discussions, amendements et vote de la représentation nationale. Vous demandez un débat public, pas d’inquiétude les parlementaires vont s’en emparer dans le cadre des règles de notre constitution.

Evitons les procès d’intention, la démagogie et les bûchers inquisitoires entendus ce soir. Notre démocratie mérite mieux !

Quant au volet local de ce vœu sur l’ouverture d’un bureau de poste aux Maisons Neuves, La Poste a fait des propositions pour l’instant rejettées.

Un simple souhait, ne prenez pas 25 000 habitants en otage de votre dogmatisme.

Notre groupe votera contre ce vœu.

Merci de votre attention.

Régis LACOSTE
Groupe UMP et apparentés