Lutter contre la crise financière sans faire payer les contribuables

Après l’accord historique du Sommet européen de l’Elysée ce dimanche 12 octobre, et à l’issue d’un Conseil des ministres extraordinaire ce lundi, le Président de la République a présenté les mesures décidées par la France pour rétablir la confiance sur les marchés financiers. Celles-ci s’articulent autour de quatre exigences fortes :

-Ne pas mobiliser l’argent des contribuables Français : ceux-ci n’ont pas à payer pour les pertes des banques alors qu’ils n’ont été associés à aucun moment aux décisions de gestion, et a fortiori pas aux bénéfices ;

-Ne pas venir en aide au système financier sans contreparties significatives pour l’intérêt général : il serait trop facile et même injuste que les banques aient recours à l’Etat pour garantir leurs fonds tout en continuant à fonctionner comme si rien ne s’était passé ; Aucune banque ne fera faillite mais celles qui auront à demander le soutien de l’Etat pour poursuivre leur activité devront fournir des contreparties en termes de rémunération de leurs dirigeants et de distribution de crédits

-Aider les banques pour sauver les économies et les emplois des Français : si tout le système bancaire défaillait, ce n’est pas les banques qui seraient en première ligne, ce sont les Français, c’est leurs économies et leurs emplois.

-Agir au plus vite : une loi de finances rectificative sera présentée au Parlement ce mardi 14 octobre, permettant aux mesures ci-après d’entrer en vigueur avant la fin de cette semaine.


I – Dès lors, le Chef de l’Etat a décidé d’agir dans deux directions :

1. Débloquer le marché des prêts entre banques, qui sont au cœur du financement de notre économie.

Compte-tenu du contexte financier actuel, chaque banque préfère garder ses liquidités, et refuse donc de prêter de l’argent aux autres banques. A plus ou moins brève échéance, c’est donc bien la survie de nos établissements bancaires qui est posée.

Une société sera donc créée pour apporter la garantie de l’Etat aux emprunts dont les banques ont besoin pour se refinancer. Celle-ci s’appliquera aux emprunts contractés avant le 31 décembre 2009, sur une durée pouvant aller jusqu’à 5 ans et dans la limite de 320 Mds d’€.

Concrètement, la société nouvellement créée va lever de l’argent sur les marchés avec la garantie de l’Etat, qui bénéficie d’une crédibilité incomparable sur les marchés financiers, et donc de taux d’intérêts préférentiels. Ensuite, la société va prêter cet argent aux banques qui en ont besoin. En contrepartie, l’Etat sera rémunéré pour cette prestation,

Par ailleurs, une convention sera signée entre l’Etat et les organismes bénéficiaires, qui portera sur la transparence des rémunérations ainsi que sur ses engagements en matière de financement des particuliers, des entreprises (notamment les PME) et les collectivités territoriales.

2.Permettre aux banques de se procurer les fonds propres nécessaires à l’établissement de nouveaux prêts

Afin d’éviter un rationnement du crédit qui aurait de graves répercussions sur l’économie réelle, l’Etat va créer une deuxième société qui sera publique et dont il sera l’unique actionnaire. Son objectif est de fournir les fonds propres nécessaires aux banques pour ne pas comprimer l’accès au crédit.

Son fonctionnement sera proche de la société « garantie interbancaire » ci-dessus, avec un plafond de garantie à 40 milliards d’euros. Là encore, l’Etat sera rémunéré pour son apport et une convention fixera les obligations des établissements concernés.

Cet apport de fonds propres visera à la fois des banques solvables pour qu’elles accroissent leurs encours de crédits et les banques en difficulté pour qu’elles ne fassent pas faillite. Naturellement ces deux catégories d’établissement ne seront pas traitées de la même manière. Dans les premières l’Etat interviendra sans prendre part à la gestion ; dans les secondes, non seulement il changera le management défaillant mais il prendra toute sa place dans le reformatage de ses activités.


II – Ce plan de lutte contre la crise financière n’est pas payé par le contribuable Français

1.L’argent mobilisé pour aider notre système économique n’est pas celui du contribuable

L’Etat lève les sommes nécessaires sur les marchés financiers classiques, y apportant simplement sa crédibilité à nulle autre pareille. Les contribuables Français ne financeront donc pas ce dispositif, puisque le coût des intérêts pour l’Etat sera intégralement couvert (et sans doute au-delà) par la rémunération de son intervention par les banques.

Si l’une des deux sociétés doit intervenir, alors ses services sont payants et l’argent ainsi récolté ira directement au budget de l’Etat. Si l’Etat intervient pour sauver une banque en crise en prenant des participations, il touchera alors des dividendes dans un premier temps (comme tout actionnaire), puis des plus-values une fois l’entreprise sauvée (comme dans le cas d’Alstom en 2004, plus-value de 1,26 milliard d’euros en moins de deux ans). C’est autant que le contribuable Français n’aura pas à payer en impôts.

2.Les 360 Mds d’€ que l’Etat mobilise ne sont en aucun cas des dépenses budgétaires :

Cette intervention se distingue totalement des dépenses publiques, c’est pourquoi toute comparaison entre ces sommes garanties et les dépenses de l’Etat pour telle ou telle politique publique n’a aucun sens :

-Quand il s’agit de garanties, elles sont octroyées sans occasionner de dépense budgétaire. Une éventuelle dépense n’interviendrait qu’en cas de défaillance d’une banque, mais toute notre action vise précisément à annuler ce risque.

-Ces garanties sont facturées à ceux qui en bénéficient. L’Etat se substitue à un service commercial, habituellement joué par le marché, mais qui ne fonctionne plus. Cette activité est rentable ; Quand il s’agit de fonds propres, il y a des actifs en contrepartie. Il ne s’agit donc en aucun cas d’investissements à fonds perdus, mais d’opérations avisées d’un point de vue financier.