Les contre-pieds de la garde des Sceaux

L'éditorial d'Yves Thréard dans le Figaro du 7 août 2012

Si l'on comprend bien les récentes déclarations de Christiane Taubira, le sentiment d'insécurité en France serait une pure invention des responsables politiques de droite. Le résultat d'un conditionnement de l'opinion publique par Nicolas Sarkozy et l'ancienne majorité.
On ne saurait trop conseiller à la garde des Sceaux un séjour dans les quartiers nord de Marseille, en Seine-Saint-Denis ou dans ces zones périurbaines de plus en plus rongées par la délinquance pour demander à leurs habitants ce qu'ils en pensent. Il est vrai qu'à peine entrée en fonction, Christiane Taubira a préféré rendre visite à des détenus, premières victimes, selon elle, de notre système carcéral.
Même si celui-ci mérite sans doute d'être amélioré, était-ce une façon de signifier à tous ceux qui souffrent de la violence au quotidien, dans leur ville, leur quartier ou leur immeuble, que leur défense n'était plus la priorité de l'appareil judiciaire français? Son objectif est de vider les prisons des personnes condamnées à des courtes peines.
Christiane Taubira va son chemin. Garde des Sceaux, donc tenue à la solidarité gouvernementale, elle ne semble pas se soucier des projets et initiatives de ses collègues et du président de la République. Le ministre de l'Intérieur demande, à juste titre, le démantèlement des camps illégaux de Roms ; elle refuse de le soutenir. Il lance des zones prioritaires de sécurité ; elle s'en tient éloignée, ne cosigne pas la circulaire Valls.
C'est à présent l'expérience des centres éducatifs fermés pour mineurs qu'elle paraît remettre en question. Pendant la campagne électorale, François Hollande avait pourtant promis d'en doubler le nombre. Comme sur d'autres sujets, a-t-il changé d'avis?
Si la politique pénale est laissée à la discrétion de la garde des Sceaux, il est peu probable que l'opinion publique, pour reprendre la formule de Christiane Taubira, y adhère longtemps.