Une exigence déçue

L'éditorial d'Yves Thréard dans le Figaro du 10 août 2012

Que ce soit sur la crise de l'euro ou l'insécurité, le recul du chômage ou la réduction de la dette publique, les Français ne se font aucune illusion.
À la lumière du sondage publié parLe Figaro , ils n'attendent pas de miracle de la part de François Hollande. À peine élu, le président de la République ne peut même pas se prévaloir de leur confiance!
Ce pessimisme traduit comme une exigence déçue. Celle d'une vision, qui fait défaut, et de changements, qui ne sont pas au rendez-vous. Il exprime aussi un doute sur les capacités de l'homme à modifier le cours des choses. Il est vrai que, depuis cent jours, le vacancier de Brégançon n'a brillé ni par son audace ni par son dynamisme. L'hésitation dans l'action le dispute au flou du discours.
La gravité de la situation du pays comme de l'état d'esprit des Français commanderait, au contraire, de prendre le taureau par les cornes.
C'est le moment ou jamais de remettre à plat notre modèle. Pour changer de fond en comble notre fiscalité, injuste et confiscatoire ; notre rapport au travail, paralysé par ces satanées 35 heures ; nos méthodes de production, peu compétitives. Sans parler de la place et des missions de l'État, qui devraient être reconsidérées. Relever ces défis exige des réformes conduites d'une main qui ne tremble pas.
La direction prise n'est malheureusement pas celle-là. François Hollande n'est pas Gerhard Schröder. Le chancelier social-démocrate avait engagé des transformations courageuses pour sortir son pays de l'ornière. Dix ans plus tard, l'Allemagne peut l'en remercier. Elle rayonne dans le tourbillon de la ­mondialisation.
Le président socialiste français ne veut sans doute pas prendre le risque de l'impopularité au sein de la gauche, en bousculant ses dogmes et ses habitudes. Mauvais calcul, car les sombres perspectives d'avenir l'obligeront, qu'il le veuille ou non, à aller à Canossa.
Déjà la rentrée s'annonce agitée.