Le Figaro / AME : une nouvelle bataille pour la droite

L'opposition est déterminée à s'opposer à la volonté du gouvernement de supprimer la franchise médicale de trente euros des étrangers sans papiers qui bénéficient de l'aide médicale d'État.

L'opposition est décidée à se battre contre toutes les mesures du collectif budgétaire 2012 qui portent l'empreinte du gouvernement Ayrault. Après avoir lutté, dans la nuit de mardi à mercredi, contre la suppression des exonérations fiscales et sociales sur les heures supplémentaires, la droite va mener le combat politique sur un autre terrain: celui de la suppression de la franchise médicale de trente euros, imposée en 2011 aux étrangers en situation irrégulière qui bénéficient de l'aide médicale d'État (AME).
Créée en 2000 sous le gouvernement Jospin, l'AME avait pour but de permettre l'accès aux soins d'urgence des étrangers sans papiers résidant en France depuis plus de trois mois. Mais les dépenses engendrées par l'AME ont été multipliées par huit de 2000 à 2011. Pour freiner le processus, le gouvernement Fillon avait décidé, le 1er mars 2011, d'instaurer un forfait annuel de soins de trente euros pour être admissible à l'AME.
La somme, modique, n'a rapporté que 3 millions d'euros à la Sécurité sociale en 2012. C'est ce forfait que la gauche veut supprimer à l'article 29 du collectif budgétaire, dont l'examen interviendra au plus tôt jeudi soir. Mardi, lors de la réunion du groupe UMP, Christian Jacob a remis en cause «l'équité» de cette suppression. «Il n'est pas normal qu'un retraité qui n'a pas de mutuelle soit en situation plus difficile qu'un immigré en situation irrégulière», a dénoncé le patron des députés UMP.
L'ancien ministre du Travail, Xavier Bertrand, a lui aussi déploré «une injustice faite aux Français et aux étrangers en situation régulière, qui paient leurs soins, par rapport aux étrangers en situation irrégulière, à qui l'on offre la gratuité» pour les soins d'urgence. Le député de l'Aisne a précisé que l'UMP mènerait «à l'automne, un grand travail pour préparer un volet de lutte contre les fraudes sociales», dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013.
Le groupe UMP a déposé pas moins de vingt et un amendements de suppression de l'article 29 du collectif budgétaire, cosignés notamment par Gilles Carrez, Bernard Accoyer, Jean-François Copé, François Fillon, François Baroin, Laurent Wauquiez et Valérie Pécresse. Le groupe Nouveau Centre a aussi déposé un amendement de suppression, cosigné par Philippe Vigier et Jean-Christophe Lagarde. «Faire sauter un droit de timbre bien modique, cela va créer un appel d'air, et faire passer le message qu'être en situation irrégulière en France permet d'être mieux soigné qu'un retraité qui doit s'affranchir d'une franchise médicale», fait valoir Philippe Vigier.

«Tourisme médical»

Lors des questions au gouvernement, mardi, Dominique Tian (UMP, Bouches-du-Rhône) s'est exclamé: «Qu'est-ce que trente euros par rapport au prix du voyage versé à des filières mafieuses pour pénétrer clandestinement sur notre territoire?» Le député libéral a estimé que cette suppression «favoriserait le tourisme médical». La ministre de la Santé, Marisol Touraine, a qualifié ces propos de «fantasme», et a ajouté: «Votre mesure a coûté cher aux hôpitaux et au budget de la Sécurité sociale, parce qu'en retardant leurs soins, ces personnes doivent être davantage prises en charge (…) Nous assumons l'exigence de justice face à des personnes qui sont seules, vulnérables et souvent isolées.» La ministre a aussi invoqué «les risques de propagation des maladies infectieuses». En marge d'une réunion de députés membres de la Droite populaire, mercredi matin, l'ancien ministre des Transports, Thierry Mariani, a jugé que la suppression du droit de timbre était «à la fois un marqueur idéologique et un signal adressé aux étrangers sans papiers». De son côté, Xavier Bertrand se demande même si cette mesure «est la première étape d'un changement en matière de politique d'immigration».