Editorial du Figaro du 10 septembre 2012

Redressement fiscal
 
Jean-Luc Mélenchon avait tort de dire que les cent premiers jours de François Hollande n’avaient servi à rien. Ces trois mois auront permis au chef de l’État de préparer un agenda, qui se donne comme horizon 2014. Ceux qui pensaient que « le changement, c’est maintenant » devront donc attendre encore un peu. Mais attendre quoi ? Il faut avoir la foi (socialiste) chevillée au corps pour se persuader que les mesures et orientations annoncées hier remettront immanquablement la France sur le chemin de l’équilibre budgétaire. À l’heure où nos voisins européens engagent dans l’urgence de douloureuses réformes de structure, François Hollande privilégie la fiscalité (10 milliards pour les entreprises, 10 milliards pour les ménages, à quoi s’ajoutera la hausse de la CSG) comme arme du redressement. Redressement national ? Il vaudrait mieux parler de « redressement fiscal »… Les économies ? Le chef de l’État entend en trouver 10 milliards. Mais autant il est précis lorsqu’il parle d’impôts, autant il entretient le flou sur ce deuxième volet de sa politique. On le comprend puisque le rabot budgétaire n’est ni dans sa nature ni, surtout, dans celle des socialistes et de leurs alliés. Surtout, en sortant son fameux « Agenda 2014 », le président de la République trompe un peu son monde. L’expression a pour objectif de rappeler le fameux agenda de Gerhard Schröder, qui vaut aujourd’hui à l’Allemagne d’être en excédent budgétaire et commercial quand ses voisins souffrent mille maux. Mais le chancelier social-démocrate n’avait pas privilégié l’impôt, il avait lancé des réformes de compétitivité, en s’attaquant notamment aux rigidités du marché du travail. Sur cette question capitale, François Hollande s’en remet aux partenaires sociaux. Or qui peut croire que Bernard Thibault accueillera avec des cris de joie la perspective d’introduire de la flexibilité dans le droit du travail ? Autant demander à Laurence Parisot de réclamer l’appropriation collective des moyens de production… Reste donc l’impôt, l’alpha et l’oméga du PS. À l’heure où le cas Bernard Arnault fait des vagues, François Hollande devrait méditer la phrase de Jeanson : « En trayant sans cesse la vache à lait, on tue la poule aux oeufs d’or. »